Etude complémentaire sur le règlement utilisation durable des produits phytosanitaires (SUR) : La filière vitivinicole européenne se dit préoccupée pour son avenir

 

5 juillet 2023 – Suite à la publication par la Commission européenne de son « étude complémentaire » sur le règlement SUR, la filière européenne du vin exprime de vives inquiétudes quant à l’avenir du secteur.

Les viticulteurs européens partagent l’objectif général de la Commission européenne (CE) de réduire l’usage des produits phytopharmaceutiques les plus dangereux. Depuis de nombreuses années, ils y travaillent par l’innovation et en évoluant dans leurs pratiques pour préserver la qualité de leurs vins tout en répondant aux enjeux de la durabilité qui repose sur trois piliers interdépendants : l’économie, l’environnement et le social.

L’Union européenne est le premier producteur mondial de vin avec 45% des surfaces viticoles mondiales. Ce secteur à forte valeur ajoutée économique contribue de manière significative à la vitalité de nombreuses régions européennes où l’activité serait pratiquement inexistante sans la vigne. En tant que premier secteur agroalimentaire en termes d’exportations, il joue également un rôle positif dans la balance commerciale de l’UE.

La viticulture européenne est unique ; elle se caractérise par ses appellations d’origine et ses indications géographiques qui ne sont pas délocalisables et qui façonnent les territoires et les paysages. De nombreux vignobles font l’objet de mesures de protection au niveau local, régional, national et parfois même international, via l’UNESCO. De manière générale, la viticulture offre des paysages et écosystèmes très divers qui abritent ainsi de très nombreuses espèces vivantes. Ces potentiels de biodiversité devraient continuer à être préservés.

Les producteurs sont pleinement engagés dans la transition écologique comme en témoignent l’utilisation de plus en plus importante de certifications environnementales, la végétalisation du vignoble, l’introduction de dispositions agro-environnementales dans les cahiers des charges ou les plans de filière, les recherches sur les variétés résistantes et le développement des surfaces en viticulture biologique.

Cependant, cette trajectoire vers une durabilité croissante ne peut être renforcée que si les objectifs fixés sont réalisables. Pour y arriver, des alternatives efficaces aux produits phytopharmaceutiques sont essentielles pour accompagner la vigne dans une transition durable qui tient compte de la viabilité de la plante et des temps que la recherche demande. Malgré des décennies de recherches et d’expérimentations, il n’y a pas encore de réponses efficaces aux maladies cryptogamiques tels que le mildiou et l’oïdium. La vigne ne dispose pas de résistance naturelle à ces maladies et, en année de forte pression, 100% des raisins peuvent être perdus en quelques jours sans l’utilisation d’intrants. Bien que l’expérimentation de variétés résistantes, qualitatives et respectant les propriétés organoleptiques des vins soient en cours, il s’agit d’une évolution qui s’inscrit dans le long terme car il faut du temps pour adapter et ensuite valider ces démarches issues de longs processus de recherche.

De plus, la compétitivité des entreprises et notamment des PME doit être maintenue pour accompagner les vignerons dans leurs démarches de durabilité. Cet équilibre pourrait être mis à mal du fait de baisses de production escomptées dans un délai court et sans solution technique alternative.

Dans ce contexte, la proposition législative de la Commission européenne est irréaliste pour la viticulture, sauf à remettre en question l’avenir de ce secteur dans l’UE. C’est pourtant le choix que la Commission européenne semble vouloir faire sans aucune réserve.

Les résultats mis en avant par l’étude complémentaire de la CE à son analyse d’impact sur l’utilisation des produits phytopharmaceutiques sont profondément préoccupants. Les projections montrent des reculs de production estimés à -28% pour les raisins en France, -20% en Italie et -18% en Espagne. Ces chiffres alarmants ne tiennent pas compte de l’impact des aléas climatiques (grêle, gèle, sècheresse etc.) qui ont régulièrement des répercussions sur la viticulture européenne.

Dans l’analyse complémentaire qu’elle publie aujourd’hui, la Commission européenne explique que ceci ne pose pas de problème majeur, arguant que les raisins, et donc le vin, ne sont pas une culture essentielle pour la sécurité alimentaire européenne. Pourtant, il est crucial de mesurer la contribution économique et sociale vitale de la viticulture dans de nombreuses régions de l’UE, tout comme l’héritage culturel que représentent la vigne et le vin pour les Etats membres producteurs. Sans la vigne, de nombreuses régions européennes seraient privées de création de richesse, d’emplois, de tourisme, et par conséquent, le développement rural comme l’aménagement de ces territoires seraient impactés négativement et durablement.

L’approche qui découle des conclusions de l’analyse de la CE est inquiétante pour l’avenir de la filière et laisse entrevoir un manque total de considération pour ce que représente la viticulture européenne. Le dialogue avec les acteurs concernés est une priorité pour accompagner la transition.

Le secteur viticole européen aspire à être un acteur de la transition écologique qui doit se faire faire de manière durable, sans sacrifier l’avenir de ce secteur et des régions viticoles européennes au profit de concurrents des pays tiers qui ne respectent pas les mêmes règles sanitaires. C’est pourquoi, il est primordial que les décideurs européens élaborent un plan d’action réaliste qui tienne compte du temps nécessaire pour trouver et mettre en œuvre des solutions alternatives efficaces à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.

 

Au nom des suivantes organisations :

L’AREV, L’Assemblée des Régions Européennes Viticoles crée il y a 34 ans est basée à Bruxelles, elle compte une cinquantaine de régions européennes membres, représentées par un double socle : les politiques régionaux élus et les représentants des organisations professionnelles viticoles. Ce modèle confère à l’AREV une légitimité statutaire et historique. (http://www.arev.org)

La CEVI, Confédération Européenne des Vignerons Indépendants (www.cevi-eciw.eu) est la seule organisation qui représente et défend les intérêts des vignerons indépendants au niveau européen. La CEVI compte aujourd’hui 12 000 membres issus de 12 Etats différents. Les vignerons indépendants sont des entrepreneurs à la tête d’une micro/petite entreprise, souvent familiale. Ils élaborent tout, de la vigne au verre, c’est-à-dire qu’ils produisent et vendent leurs vins directement au consommateur.

Le Copa et la Cogeca sont la voix unifiée des agriculteurs et des coopératives agricoles dans l’UE. Le Copa représente plus de 22 millions d’agriculteurs et leurs familles, tandis que la Cogeca défend les intérêts de 22 000 coopératives agricoles.

EFOW, la Fédération européenne des vins d’origine (www.efow.eu), est l’organisation qui représente les vins AOP et IGP auprès des institutions européennes. En tant que représentant des vins d’origine, notre mission est de protéger et de promouvoir le concept d’IG dans tous les domaines politiques.

 

Etude complémentaire sur le règlement utilisation durable des produits phytosanitaires (SUR) : La filière vitivinicole européenne se dit préoccupée pour son avenir