Position de EFOW sur le futur de la PAC post 2013

Introduction

La réforme de la PAC post 2013 se déroulera en parallèle à la redéfinition des nouvelles perspectives financières pour 2013-2020. La détermination de ce budget aura une retombée importante sur l’avenir de la PAC. De nombreux acteurs souhaitent une nouvelle répartition du budget avec davantage de fonds pour financer non seulement la PAC (approximativement 40% du budget communautaire aujourd’hui), mais aussi d’autres priorités (énergie, recherche et développement, etc.).

EFOW (European Federation of Origin Wines) considère que la PAC a su répondre aux objectifs qu’elle s’était fixée (la modernisation de l’agriculture, le développement de la production, l’autosuffisance alimentaire etc.) et estime que la structure en 2 piliers doit être maintenue. La PAC doit continuer à être une politique ambitieuse capable de répondre aux nouvelles exigences. Pour ce faire, il est vital qu’elle reste une politique communautaire. La renationalisation de la PAC (législation, financement etc.) irait à l’encontre du développement durable et harmonieux de l’agriculture européenne sur l’ensemble du territoire de l’UE. Par ailleurs, il est fondamental de maintenir une gestion centralisée de la PAC au niveau européen pour garantir une concurrence saine et loyale sur le marché intérieur.

EFOW demande une PAC forte, respectueuse de la spécificité des filières et régulatrice.

Une PAC forte

EFOW estime qu’il est fondamental que le budget de la PAC soit au moins maintenu à son niveau actuel pour garantir la sécurité alimentaire de l’Union, le maintien d’emplois/d’activités dans le milieu rural, la gestion de l’espace européen et des ressources naturelles. Il faut souligner que le financement de l’agriculture européenne représente moins de 1% de toutes les dépenses publiques de l’UE. Par ailleurs, le budget de la PAC a été maîtrisé ; sa part dans les dépenses communautaires est en baisse sensible (33% 2015 contre 50% 2000).

EFOW considère que la PAC est une des pierres angulaires de l’UE et qu’elle doit donc être au cœur de la Stratégie 2020. Une diminution de son budget ne lui permettrait pas d’évoluer et de s’adapter aux nouvelles demandes du marché et aux attentes des consommateurs, notamment en terme de sécurité, de qualité et de contribution aux nouveaux défis comme le changement climatique. Toutefois, l’objectif principal de la PAC doit rester la production de denrées alimentaires de qualité pour les consommateurs et le maintien de revenus adéquats pour les agriculteurs.

Concernant plus spécifiquement le secteur du vin, il est important de noter que le secteur vitivinicole l’UE est le premier producteur, consommateur et exportateur de vins au niveau mondial (17 des 27 Etats membres produisent du vin) et les vins d’origine représentent une part considérable dans les balances commerciales de nombreux Etats Membres. Il est une source importante d’emplois dans les zones rurales (par rapport à d’autres cultures, la production de raisin est très intensive en main d’œuvre). Enfin, la vigne a façonné les paysages européens et les économies locales (ex. oenotourisme) car les zones viticoles sont parmi les plus fragiles de l’UE et manquent souvent de véritables alternatives économiques. Il est donc possible d’affirmer que les vins d’origine jouent un rôle primordial du point de vue socio-économique, environnemental et culturel.

Une PAC respectueuse de la spécificité des secteurs

EFOW souhaite que les acquis de la viticulture européenne soient maintenus dans la future PAC. La PAC doit :

· Tenir compte de la spécificité de chaque secteur, notamment celui du vin ;

· Mettre l’accent sur la production des produits de qualité.

Plus spécifiquement, il s’agit de préserver la spécificité du secteur du vin sous ses différents angles :

. Du point de vue budgétaire : le vin dispose d’une enveloppe nationale dans le cadre de l’OCM unique qui permet à chaque Etat membre une certaine flexibilité dans l’agencement des dépenses et l’apport d’aides spécifiques au secteur. Ces mesures comprises dans les programmes d’aides sont fortement mobilisées en faveur de mesures spécifiques telles que l’aide à la restructuration du vignoble ou la promotion sur les marchés internationaux. Ces exemples illustrent les besoins particuliers de la filière ce qui justifie le maintien d’un volet d’aides spécifiques pour le secteur.

· D’un point de vue réglementaire:

o Le vin est tout d’abord un produit agricole transformé, ce qui signifie qu’une réglementation spécifique et détaillée a été adoptée par rapport aux autres produits agricoles. Ceci couvre en particulier la définition, la liste des pratiques œnologiques autorisées, l’étiquetage et la présentation, la promotion, les échanges avec les pays tiers, le potentiel de production, les règles sur la traçabilité etc.

o La viticulture est ensuite un secteur très spécifique qui se caractérise par la grande diversité de sa production et par une part importante de produits sous signe d’origine. La différenciation entre ces vins s’illustre à travers une réglementation précise et stricte en matière de production, d’étiquetage et de présentation.

o Le vin est particulièrement réglementé parce qu’il contient de l’alcool. Il obéit à ce titre à des règles précises d’étiquetage, de traçabilité et de suivi.

o Enfin il est à noter que la politique de qualité pour les vins est une partie intégrante de l’OCM unique. Compte tenu du poids des vins sous signe d’origine dans la production totale de vins dans l’Union, la politique de qualité des vins est une partie intégrante de la politique viticole et doit continuer à être discutée dans ce cadre (OCM unique).

EFOW considère donc que le vin ne peut pas être géré par un ensemble de règles non différenciées applicables à tous les secteurs agricoles. La PAC post 2013 doit garder les mesures spécifiques actuelles pour la filière qui prennent en considération ses caractéristiques particulières.

En outre, EFOW estime que la PAC post 2013 devra s’attacher à renforcer la production de produits de qualité. Dans ce cadre, les questions relatives aux Appellations d’Origine Protégées (AOP) et Indications Géographiques Protégées (IGP) devront être pleinement prises en compte. EFOW souhaite que la politique de qualité soit intégrée au sein de la PAC.

Plusieurs statistiques démontrent que la société civile en Europe attache une grande importance à la qualité et à la traçabilité des denrées alimentaires. La production de denrées alimentaires de qualité, assurée dans l’UE par sa législation spécifique et notamment grâce à sa politique de qualité, ne trouve pas toujours d’équivalent chez ses partenaires commerciaux. A ce titre, elle s’intègre pleinement dans le cadre du débat sur les biens publics. Les produits AOP et IGP permettent en effet le maintien de la production de produits traditionnels dans des zones souvent défavorisées et participent à la préservation de la biodiversité et des paysages, ainsi qu’à la création d’emplois et de développement rural. En outre, il nous parait important d’ajouter aux nouveaux défis définis par le Bilan de Santé de la PAC la préservation des savoirs faire et de la biodiversité, qui peuvent notamment être assurés par le maintien d’une agriculture dynamique dans ces zones défavorisées. Grâce à leurs cahiers des charges, les vins d’origine participent à ce maintien et favorisent la production de variétés de vignes autochtones, originales et adaptées à chacun des terroirs.

La production de vins d’origine est en ligne avec les demandes de la société et des consommateurs : qualité et traçabilité des produits, préservation de la biodiversité et développement des zones rurales. EFOW se félicite du débat sur les biens publics, tout en souhaitant qu’un soutien financier public approprié soit mis en place dans le cas où de nouvelles conditions importantes seraient imposées aux producteurs. En effet, s’il n’est pas mis en place, la compétitivité du secteur des vins d’origine sera ébranlée.

Une PAC régulatrice

EFOW estime que la PAC doit permettre le maintien d’instruments permettant aux différents secteurs agricoles de répondre aux aléas naturels (ex. climat) et à la forte volatilité des marchés. En effet, une production durable exige des mesures de gestion et de régulation.

Le cadre normatif de la PAC après 2013 devra permettre d’établir les conditions de fonctionnement optimal de chaque secteur et, en particulier, prévenir les crises néfastes pour les différents secteurs et pour le budget. Le secteur vin bénéficie actuellement d’outils spécifiques de régulation de marché dans l’OCM unique. Ces outils sont placés sous la responsabilité des Etats membres et peuvent être mis en œuvre par les organisations interprofessionnelles. EFOW est attachée au modèle interprofessionnel et souhaite que les compétences spécifiques qui sont reconnues aux interprofessions viticoles dans l’OCM unique soient maintenues. Pour autant, cette capacité à réguler les marchés n’est pas suffisante. La régulation doit pouvoir s’appliquer de la production à la commercialisation. Le secteur vin bénéficie depuis 1972 d’un instrument de régulation de la production (droits de plantation), la fin de cet instrument est programmée en 2015. La disparition brutale de tout encadrement de la production risque de provoquer des crises de surproduction, des chutes de prix et la remise en cause des efforts qualitatifs réalisés par les producteurs ces dernières décennies. EFOW demande la mise en place d’un instrument de régulation de la production pour l’ensemble de la viticulture. EFOW estime que la gestion de la production est une condition indispensable pour préserver la qualité et par conséquent la réputation des vins notamment ceux sous signe d’origine. La responsabilité qui a été confiée aux Etats membres en matière de régulation de marché dans l’actuelle OCM unique doit être élargie à la régulation de la production. En conséquence, EFOW demande une modification de la législation communautaire afin que les États membres puissent autoriser la gestion de la production sur la base de critères objectifs et non discriminatoires

En l’absence de cette possibilité de gestion de la production (en amont), le secteur vin sera soumis à d’importants aléas de marché qui amèneront des obligations de déstockage à des prix non rémunérateurs. En l’absence d’un mécanisme de régulation spécifique, le secteur vin risque d’être confronté à des crises et à devoir demander des aides spécifiques afin d’y faire face (distillation de crise, arrachages, vendange en vert etc.).

EFOW souhaite que la PAC post 2013 tienne compte des enjeux liés à la promotion des produits sur les marchés, qu’il s’agisse des marchés des pays tiers ou su marché intérieur, premier marché de consommation de vins au monde. Aujourd’hui, les règles communautaires en matière de promotion du vin ne sont pas adaptées à la réalité du marché. EFOW souhaite que des outils soient disponibles pour promouvoir de manière responsable l’importance de la viticulture de qualité auprès des consommateurs européens et sur le marché mondial. Par ailleurs, il conviendrait que les actions co-financées par le volet promotion de la PAC puissent s’inscrire dans la durée (jusqu’à 5 ans). D’une manière générale, la PAC post 2013 doit prévoir des budgets plus importants pour la promotion.

Enfin, les vins d’origine souffrent de nombreuses usurpations à travers le monde. EFOW souhaite que la PAC post 2013 mette à disposition des aides financières spécifiques pour les vins avec IG pour mener des actions destinées à renforcer la protection des vins avec IG en particulier dans les pays tiers. La recherche et le développement sont également deux aspects à ne pas négliger pour l’avenir du secteur vin.